Description du projet
Depuis plusieurs années, les distributeurs automatiques se font une place dans le paysage de la boulangerie-pâtisserie. Baguettes, pizzas, casiers réfrigérés, produits secs, snacking… Les formats se diversifient, les technologies évoluent, et de plus en plus d’artisans s’y intéressent.
Mais derrière la vitrine technologique, de vraies questions stratégiques émergent :
👉 Comment intégrer intelligemment ces outils sans dénaturer son métier ?
👉 Quels sont les modèles les plus adaptés à mon territoire ou à ma clientèle ?
👉 Et comment garantir la qualité, la conformité et la rentabilité de cette nouvelle forme de distribution ?
C’est pour y voir plus clair que nous avons organisé une après-midi d’étude, réunissant artisans, élus, porteurs de solutions et acteurs du développement local.
🎯 Objectif : réfléchir collectivement aux opportunités (et aux limites) qu’offre l’automatisation, et repartir avec des idées concrètes et inspirantes.
🧠 Un tour de table pour poser les vraies questions
Comment développer les ventes en dehors des horaires d’ouverture classiques, dans une ville-dortoir où les flux sont décalés ?
L’automatisation peut-elle être un moyen de tester ou de valoriser une nouvelle gamme de produits secs, comme des biscuits ?
Est-ce que la mise à disposition de produits en entreprise – cantines, salles de pause – est une piste crédible pour diversifier les débouchés ?
Autant de réflexions qui montrent que l’automatisation n’est pas qu’une affaire de machines, mais bien une question de stratégie commerciale, de modèle économique et d’ancrage territorial.
🏘️ Automatisation & territoires : entre complémentarité et mutations du commerce de proximité
L’après-midi s’est poursuivie avec une table ronde qui a permis de croiser les regards entre acteurs territoriaux et artisans boulangers, autour d’une question simple mais essentielle :
👉 Quel rôle peut (ou doit) jouer l’automatisation dans le développement économique local ?
🤝 Des territoires aux réalités contrastées
Jean-Luc Besnier, maire de Ligné (44) et membre de la communauté de commune Erdre et Gesvres et Jérome Le Jart, maire de Gouarec et membre de la communauté de communes Cœur de Bretagne, ont rappelé les compétences respectives des mairies et des intercommunalités en matière d’économie de proximité.
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Les communautés de communes, titulaires de la compétence économique, disposent souvent d’un référent dédié. Ce dernier peut accompagner les porteurs de projet, informer sur les aides possibles et apporter une vision globale du territoire. Mais attention : pour pouvoir bénéficier de certaines subventions, il est important de se rapprocher de ces acteurs avant la signature des devis.
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Les mairies, elles, conservent un rôle via leur compétence générale, le PLUI (plan local d’urbanisme intercommunal), ou encore le droit de préemption. Autrement dit, elles peuvent favoriser ou freiner des implantations selon leur propre vision du tissu commercial.
🧠 “Il n’y a que des cas particuliers.” résume Yanis Buet, responsable du service ACTE présent à la rencontre. “Dans certains villages, un maire pourra s’opposer à un distributeur pour protéger un commerce. Et dans d’autres, c’est justement parce qu’il n’y a plus de commerce que le distributeur est encouragé.”
Et parfois, la posture politique varie au gré des mandats ou de la pression électorale : protéger le commerce traditionnel d’un côté, mais aussi répondre à la demande de services 7 jours sur 7 de l’autre. Une contradiction pas si rare dans les zones rurales en tension.
🧺 Commerce & lien social : des points de vue à nuancer
Les élus interrogés ont partagé le souhait de maintenir les commerces traditionnels comme lieux de vie et de lien social. L’un d’eux estimait d’ailleurs qu’un distributeur automatique ne favorise pas ce lien humain, et qu’il ne peut se substituer à un commerce physique.
Un avis qui a fait réagir plusieurs artisans boulangers dans la salle.
🎙 “Chez moi, dans un petit village, les gens se retrouvent justement devant le distributeur à baguettes. Ils discutent, échangent les nouvelles… Ça reste un lieu de rencontre comme un autre.”
Ce constat terrain vient bousculer certaines idées reçues : le distributeur ne fait pas forcément disparaître le lien social, il peut même le redessiner différemment.
Il ne remplace pas la boutique, mais il complète la présence artisanale dans des lieux où un commerce permanent ne serait pas viable économiquement.
🧠 Penser l’automatisation comme un levier stratégique
Pour Yannis Buet, l’automatisation est un outil au service d’un projet bien pensé, pas une solution magique.
Il évoque des pistes concrètes :
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Créer un laboratoire central qui alimente plusieurs points de vente automatiques dans différentes communes,
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Déployer un réseau de distributeurs en click & collect,
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Penser ces solutions au niveau de la communauté de communes, pour plus de cohérence et de masse critique,
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Maintenir la propriété du concept dans les mains de l’artisan (et non d’un tiers extérieur ou de la commune).
🧮 “L’automatisation, c’est aussi une réponse possible pour les entreprises sous les 300 000 € de CA, qui doivent être malines pour rester rentables.”
En somme, l’automatisation en boulangerie n’est pas un choix technique, mais une décision stratégique, à ajuster à son territoire, sa clientèle, son modèle économique… et surtout à sa vision du métier.
🧩 Automatisation : des projets sur-mesure, portés par les artisans eux-mêmes
Florian Nerrière, dirigeant de la société Distri’click (spécialisée dans les solutions d’automatisation), a apporté un éclairage technique et commercial.
Son credo : “Vous voulez vendre un produit ? On vous construit la solution pour le distribuer, tout simplement.”
Avec une expérience de 12 ans en boulangerie-pâtisserie et une connaissance pointue du terrain, il confirme que :
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L’automatisation peut contribuer à redynamiser des zones sans commerces,
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Elle connaît une saisonnalité forte (notamment de mai à octobre),
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Elle attire aussi désormais les industriels et les grandes surfaces, qui voient dans le concept un nouveau canal de vente. On le voit déjà avec les magasins autonomes type Happy, les distributeurs comme Mie’Happy (filiale de Briogel).
Ce qui alerte certains artisans :
🛑 “Le vrai enjeu, ce n’est pas juste comment on distribue les produits… c’est comment on garde nos artisans en place.”
🤝 La semi-automatisation : un compromis efficace
Les retours d’expérience de Florian Nerrière l’amène à dire que :
❗ Le 100% automatique, c’est possible… mais pas forcément rentable.
Il constate en effet que la majorité des clients qui sont passés à un modèle 100 % automatique ont perdu du chiffre d’affaires, notamment à cause de la déperdition de la clientèle fidèle, souvent plus âgée ou simplement attachée au contact humain.
C’est pourquoi il défend une approche plus nuancée : la semi-automatisation, comme complément de l’activité artisanale, et non comme un remplacement.
💡 L’idée ?
Positionner la distribution automatique comme un service additionnel, destiné à :
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Prolonger l’offre sur les plages horaires à faible fréquentation (soirées, très tôt le matin, jours de fermeture),
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Toucher une nouvelle clientèle qui ne peut pas venir en boutique aux horaires classiques (travailleurs en horaires décalés, trajets domicile-travail…),
- Créer des points de vente mobiles ou délocalisés sur des communes voisines.
C’est le cas notamment de Gourmandises et Tradition, boulangerie localisée à proximité de Montpellier, et dont vous retrouverez l’intégralité de l’interview dessous 👇
🛠️ Tout est (presque) possible : l’automatisation sur mesure
👉 Ce qu’il faut retenir, c’est qu’en matière d’automatisation… on peut (presque) tout faire.
🥖 Produits distribuables :
Pain, viennoiseries, pâtisserie, snacking, plats préparés, biscuits, boissons, produits secs ou réfrigérés… L’éventail est large et les machines peuvent gérer plusieurs gammes en simultané.
📦 Formats et équipements :
Source : site web Distri’Click |
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💡 Services intégrés possibles :
Source : site web Distri’click |
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🛠️ Approches hybrides :
Source : pepeat |
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🧠 Et même… des systèmes basés sur la confiance client (auto-déclaration de la quantité prise), ou la technologie avancée (caméra, capteurs, balance) pour facturation automatisée sans interaction.
Florian Nerrière, nous a fait part de nombreux retours clients. De notre côté, nous avions effectué une veille documentaire et des interviews dont vous trouverez l’intégralité dessous 👇
📋 Et côté hygiène ? HACCP et nouvelles exigences
Comme l’a rappelé Stéphane Graffin, formateur et consultant en hygiène et sécurité alimentaire, qu’il soit question de pain, de snacking ou de plats cuisinés, la distribution automatique ne fait pas exception aux règles d’hygiène. Les obligations HACCP (Hazard Analysis Critical Control Point) s’appliquent à ce mode de distribution comme à n’importe quel point de vente alimentaire.
📋 Côté administratif : quelques ajustements à prévoir
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Si vous ajoutez un distributeur proposant des produits contenant des ingrédients d’origine animale, vous devez modifier votre déclaration d’activité auprès de la DDPP.
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Votre Plan de Maîtrise Sanitaire (PMS) doit être mis à jour en intégrant le distributeur : plan de nettoyage (qui, quoi, comment, quand), contrôle de la température, gestion des non-conformités…
💡 Seuls les nettoyages non quotidiens doivent être tracés par écrit. -
Mettez également à jour votre DUERP (Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels) : pour inclure les risques liés à l’utilisation de produits chimiques (nettoyage des machines) et au risque routier, si vous ou vos salariés réapprovisionnez les distributeurs en déplacement.
🧾 Côté information au consommateur : transparence obligatoire
Même si vos produits sont vendus via une machine, certaines informations doivent être clairement affichées :
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Allergènes, généralement indiqués sur la machine par les fabricants,
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Origine des viandes et préparations carnées (jambon, lardons…) si produits traiteurs,
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Mention de congélation, si le produit a été congelé,
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Étiquetage des produits préemballés : dénomination, liste des ingrédients, DDM/DLC, conditions de conservation…
👉 Les valeurs nutritionnelles pour les entreprises qui comptent moins de 10 salariés, un chiffre d’affaires annuel inférieur à 2 millions d’euros, et une vente dans un rayon de moins de 100 km.
⚠️ Sécurité sanitaire : les points de vigilance à ne pas oublier
Même avec des machines modernes, la rigueur reste de mise :
🌡️ 1. Chaîne du froid
Les produits sensibles (pâtisseries, plats préparés…) doivent être conservés dans les bonnes conditions.
➡️ La plupart des distributeurs proposent un suivi en temps réel de la température et un blocage automatique en cas de dépassement de DLUO ou de problème de froid.
🧽 2. Nettoyage des machines
Prévoyez une routine claire pour le nettoyage : zones à désinfecter, fréquence, produits utilisés…
🚛 3. Transport des produits
En dessous de 80 km : caisse isotherme et pains de glace suffisent.
Au-delà : camion réfrigéré obligatoire.
Dans tous les cas, véhicule propre et respect des températures sont essentiels.
📦 4. Traçabilité et gestion des invendus
Vos produits doivent pouvoir être reliés à leurs matières premières (origine, DLUO, etc.).
👉 Les machines permettent souvent de bloquer automatiquement les produits périmés et d’assurer une bonne rotation des stocks.
🧾 5. Agrément sanitaire : attention à la livraison inter-SIRET
Depuis juin 2023, si vous approvisionnez une machine rattachée à un autre SIRET que celui de votre labo de production, vous êtes soumis à l’agrément sanitaire.
🔎 Et si on allait plus loin que le pain ?
L’automatisation ne se limite pas aux baguettes ou aux viennoiseries. Aujourd’hui, l’offre boulangère peut parfaitement s’intégrer dans une gamme plus globale de produits frais, vendus en distribution automatique : plats cuisinés, snacking, salades, produits laitiers, boissons… Et dans beaucoup de concepts, le pain reste un produit d’appel fort, celui qui attire le client et l’incite à découvrir le reste de l’offre.
Ce positionnement ouvre de nouvelles pistes : s’associer avec d’autres artisans ou producteurs, proposer une offre complète dans les zones sans commerces, ou encore créer un vrai corner de proximité, accessible en libre-service… mais toujours artisanal dans l’esprit.
Ca vous intéresse ?
Nous vous laissons consulter nos deux interviews :